L’Opéra… dans l’imaginaire de beaucoup de gens, l’opéra se résume à une imposante chanteuse nordique qui s’égosille en torturant les tympans des malheureux spectateurs. Plus sérieusement, l’opéra a souvent la réputation d’un art élitiste, poussiéreux, et surtout difficile à appréhender. Comment mieux faire comprendre ce qu’est l’opéra au « non public » ? C’est le défi que s’est lancé Rozenn Chambard, responsable des publics à l’Opéra de Rennes.
Ne vous y trompez pas, le taux de fréquentation de l’Opéra de Rennes est tout à fait satisfaisant. Les actions mises en place sont destinées à attirer un public qui ne connaît pas ou très peu l’opéra. Ainsi, depuis 1998, l’Opéra de Rennes dispose d’un service éducatif. Celui-ci organise chaque année un parcours de découverte à l’attention du jeune public dans le cadre scolaire. Pour cela, un dossier pédagogique est conçu pour chaque oeuvre en collaboration avec une « conseillère relais » détachée par l’Education Nationale. Il fournit aux professeurs les clefs de lecture de l’opéra (livret, extraits de partition, informations sur le compositeur, …) nécessaires pour préparer la visite des élèves à l’Opéra. Les classes ont ensuite la possibilité de visiter les locaux de l’Opéra, de rencontrer les artistes et les techniciens et enfin, d’assister au spectacle. Toutes les activités proposées sont gratuites, excepté le prix des billets, proposés à un tarif préférentiel.
Rozenn Chambard, très motivée par le désir d’élargir le public de l’opéra, a imaginé d’autres actions : partenariat avec d’autres structures culturelles, tournée d’un opéra en région Bretagne, parcours découverte pour les adultes dans le cadre des associations de quartiers… Pourtant, elle se trouve freinée en raison de la capacité réduite des locaux (650 places). En effet, le public des abonnés, toujours très prompt à réserver sa place, suffit à remplir la salle. La solution pourrait être de multiplier les représentations, qui sont peu nombreuses (environ 60 par an) ; cependant, l’opéra est un art très spécifique, qui exige l’intervention de nombreux acteurs : musiciens, chanteurs, choristes, techniciens, costumières, metteur en scène, décorateurs… Le coût d’une représentation est considérable. Il s’agit donc de trouver un équilibre entre un nombre de représentations suffisant, et l’accueil d’un nouveau public, sans pour autant léser les abonnés. C’est dans cette perspective que s’est créé le concept d’Happy Hour : il s’agit d’un spectacle d’une heure, sans costumes ni décors, joué tôt dans la soirée, avec un tarif de 3.50 €. Les extraits d’airs lyriques sont choisis selon une thématique (genre musical, époque, pays, …), qui correspond à l’opéra programmé dans les semaines qui suivent. Destiné à un public de primo spectateurs, plus familial et plus jeune que les spectateurs habituels, le concept fonctionne très bien.
Les efforts de démocratisation de l’Opéra de Rennes peuvent sembler surprenants, du fait de l’existence d’un public fidèle et nombreux. Cela peut être expliqué par le fait qu’il s’agit d’une structure en régie municipale. La Ville finance en effet l’Opéra à hauteur de 95%. Il paraît donc légitime, de ce point de vue, que cette subvention puisse profiter au plus grand nombre.